Que se passe-t-il dans la ruche lors de la période de préparation à l'hivernage ?



Au mois de juillet et août, les apiculteurs réalisent leur dernière récolte de l’année, le fruit de leur travail et de celui de leurs abeilles. Néanmoins, les vacances ne sont pas pour tout de suite ! En effet, il est déjà temps de préparer l’hiver. Cette période est cruciale car les colonies doivent se préparer à passer l’hiver au chaud dans la ruche. Voyons ensemble ce qui se passe dans la ruche pendant cette phase et quelles actions l'apiculteur peut entreprendre pour aider ses colonies à bien hiverner.

Que se passe-t-il dans la ruche à l’approche de l’hiver ?

À partir du mois de juillet, plusieurs changements importants s’opèrent au sein de la ruche. Ces changements sont influencés par la diminution des ressources disponibles dans l’environnement et par la préparation naturelle de la colonie pour survivre aux mois froids.

1. Diminution de la ponte de la reine

À partir de juillet, la reine commence à pondre moins d’œufs. Cela peut être dû à plusieurs facteurs tels que la réduction des ressources alimentaires (pollen et nectar) ou une baisse des températures. Si le "trou de miellée" estival, une période où les fleurs produisent peu de nectar, est trop intense, la ponte peut même être temporairement interrompue. Cette réduction de la ponte permet de réduire la consommation de nourriture de la colonie, un élément crucial pour sa survie durant l’hiver. Par conséquent, la population de la colonie va grandement diminuée

Cependant, il est essentiel que la reine reprenne rapidement sa ponte après cette pause. Les abeilles qui naissent à la fin de l’été et au début de l’automne sont les abeilles d’hiver. Contrairement aux abeilles d’été qui vivent environ six semaines, les abeilles d’hiver ont une durée de vie plus longue, allant jusqu'à six mois. Elles sont dotées de réserves de graisse plus importantes (les corps gras) qui leur permettent de survivre durant les mois froids, où elles n’ont pas à butiner mais à maintenir la chaleur au sein de la grappe hivernale.

2. Expulsion des mâles (faux-bourdons)

En parallèle, les mâles, appelés faux-bourdons, n'auront pas la chance de voir l'hiver arriver. Ils sont expulsés de la ruche par les ouvrières car ils ne contribuent pas à la récolte de nourriture ni à la défense de la ruche. En hiver, chaque bouche inutile représente un danger potentiel pour la survie de la colonie. C’est une scène souvent surprenante pour les débutants : voir des faux-bourdons chassés de la ruche, incapables de retourner à l'intérieur, mourant de faim ou de froid à l’extérieur.

3. Surveillance des maladies et des parasites : le cas du varroa

Si vous observez des abeilles avec des ailes déformées, c'est un signe préoccupant. Elles sont probablement atteintes du virus des ailes déformées (DWV), une des nombreuses maladies transmises par le terrible acarien Varroa destructor. Ce parasite affaiblit les abeilles et peut même provoquer l'effondrement complet de la colonie s'il n'est pas maîtrisé.

Il est crucial de surveiller les signes d'infestation par le varroa à cette période de l'année, car une forte infestation en fin de saison compromet sérieusement la survie des abeilles d'hiver. Les traitements contre le varroa doivent donc être planifiés et appliqués correctement pour réduire la charge parasitaire à un niveau tolérable.

4. Stockage de miel et de pollen

Enfin, les butineuses continuent de profiter des dernières floraisons pour collecter du nectar et du pollen. Ces ressources sont vitales : une colonie a besoin d'environ 10 à 15 kg de miel pour survivre à l'hiver. Le miel sert de source d'énergie et le pollen, riche en protéines, est essentiel pour nourrir les larves dès la reprise de la ponte à la fin de l'hiver. Les abeilles vont donc sceller les cellules de miel avec de la cire pour le protéger et le conserver jusqu'à ce qu'il soit nécessaire.

Que faire pour aider sa colonie à bien préparer l’hivernage ?

L’apiculteur a un rôle clé pour soutenir la colonie dans sa préparation à l’hiver. Voici les principales actions à entreprendre :

1. Vérifier la ponte de la reine

Il est crucial de s’assurer que la reine pond encore suffisamment d’œufs pour produire des abeilles d’hiver en nombre. Une colonie avec une population réduite ne sera pas capable de générer assez de chaleur pour passer l’hiver. Si la ponte est insuffisante ou si la reine semble défaillante (vieille ou malade), il peut être nécessaire de la remplacer par une reine jeune et dynamique.

Attention, une rupture de ponte peut être observée quand il n’y a plus assez de réserves de miel ou de pollen dans la ruche. Si c’est le cas, vous pouvez la stimuler en lui fournissant du sirop “50/50”

2. Surveiller les réserves de la ruche

Une étape souvent négligée par les apiculteurs débutants est la surveillance du poids de la ruche à l'approche de l'hiver. Cette vérification est pourtant essentielle pour s'assurer que la colonie dispose de suffisamment de réserves de miel et de pollen pour survivre jusqu'au printemps. En général, une ruche devrait peser environ 35 kg au total, y compris les abeilles, les cadres, et surtout les réserves de miel.

Pourquoi surveiller le poids ?

Les abeilles ont besoin de ces réserves pour plusieurs raisons :

  • Chauffer la ruche : Pendant l'hiver, les abeilles se regroupent en une grappe compacte pour maintenir la chaleur à l'intérieur de la ruche. Elles consomment du miel pour produire l'énergie nécessaire au maintien de cette chaleur, surtout lors des vagues de froid.

  • Nourrir la colonie : Les abeilles d'hiver, qui vivent plusieurs mois, se nourrissent exclusivement des réserves stockées. Si ces réserves sont insuffisantes, la colonie risque de mourir de faim avant la reprise des floraisons.

Que faire si le poids est insuffisant ?

Si le poids de la ruche est inférieur à 35 kg à l'approche de l'hiver, il faudra envisager de nourrir votre colonie pour renforcer les réserves. Voici quelques options :

  • Nourrissement au sirop lourd : Vous pouvez fournir du sirop de sucre épais (2 kg de sucre pour 1 litre d'eau) en début d'automne. Ce type de nourrissement stimule la colonie à stocker des réserves.

  • Ajouter des cadres de miel : Si vous avez des cadres de miel en surplus provenant d’autres ruches ou de précédentes récoltes, vous pouvez les ajouter à la ruche déficitaire pour augmenter ses réserves.

Conclusion sur la surveillance du poids

La surveillance régulière du poids de la ruche permet d'anticiper les pénuries de nourriture et de prendre des mesures correctives à temps. Une ruche pesant environ 35 kg est généralement bien préparée pour affronter les rigueurs de l'hiver. En tant qu'apiculteur, cette mesure préventive vous permet de garantir la survie et la vitalité de vos colonies jusqu'au printemps suivant.

3. Nourrissement stimulant

Les premières abeilles d'hiver commencent à être pondues au mois d'août. Si vos colonies sont en bonne santé et bien peuplées, il n'est généralement pas nécessaire de stimuler le pont de la reine à cette période. Un nourrissement avec du sirop épais pour les réserves hivernales suffira. Cependant, si vous avez des colonies de taille moyenne ou faible, avec peu d'abeilles, une légère stimulation peut leur être bénéfique.

Dans ce cas, il est recommandé de fournir à la ruche environ 200 ml de sirop léger (dans un rapport 50:50) tous les deux jours, sur une période de deux à trois semaines. Ce nourrissement imite une miellée en cours, ce qui incite la colonie à s'activer. Les abeilles nourricières bénéficient d'une meilleure alimentation, produisant davantage de gelée royale et nourrissent mieux la reine, ce qui augmente sa ponte. Les œufs pondus à ce moment-là donneront naissance à de précieuses abeilles d'hiver.

Il est important de noter que ce nourrissement ne sert pas à renforcer les réserves hivernales, car le sirop léger est entièrement consommé par les abeilles. Son but est d'aider à développer la colonie en stimulant l'activité interne.

4. Resserrer la colonie

En fin de saison, il est recommandé de resserrer la colonie en réduisant l’espace dans la ruche. Cela consiste à enlever les cadres non utilisés et à recentrer la colonie sur le nid à couvain. Un espace réduit est plus facile à chauffer et à protéger. Assurez-vous de ne laisser que des cadres bien garnis de miel de chaque côté du nid à couvain.

5. Isoler le toit de la ruche pour limiter les déperditions de chaleur

Les pertes de chaleur par le toit de la ruche peuvent être importantes. Pour éviter cela, il est conseillé de placer un isolant sous le toit. Cet isolant peut être du polystyrène, du carton, ou tout autre matériau naturel comme la laine. Une bonne isolation aide à maintenir une température interne stable, permettant aux abeilles de conserver leur énergie.

6. Réduire l’entrée de la ruche

Une large entrée de ruche est une source de déperdition de chaleur et un point d’accès pour les pillards (abeilles d’autres ruches) et les intrus comme les rongeurs. Réduisez l’entrée de la ruche à quelques centimètres. Cela permet également aux abeilles de mieux contrôler les intrusions et de limiter les risques de pillage en fin de saison.

7. Réunir deux colonies trop petites

Si vous avez deux colonies trop faibles pour survivre à l’hiver seules, il peut être judicieux de les réunir. Cela permet de renforcer les effectifs et de mettre en commun les ressources. Pour ce faire, placez un journal entre les deux ruches pour que les colonies puissent s'habituer à l'odeur de l'autre et se réunir sans combattre. Cette technique permet de fusionner deux colonies sans trop de conflits et d'optimiser les chances de survie.

8. Renforcer une colonie faible

Une colonie faible peut être renforcée sans devoir remplacer la jeune reine. Pour ce faire, vous pouvez introduire un ou plusieurs cadres de couvain, idéalement operculés, provenant d'une colonie plus forte. Il est essentiel de choisir des cadres sans les abeilles pour éviter tout conflit entre les colonies.

Il est crucial de réaliser cette opération uniquement lorsque les températures sont suffisamment douces. Si le couvain est exposé à des températures trop basses, il pourrait ne pas survivre, ce qui nuirait à la colonie déjà affaiblie.

Cette méthode est efficace pour stimuler le développement d'une colonie faible sans nuire à la santé de la ruche d'origine. Une fois les cadres de couvain intégrés, veillez à nourrir la colonie selon ses besoins : utilisez un sirop léger (50:50) pour augmenter la population si elle manque d'abeilles ou optez pour un sirop plus concentré (70:30) si la colonie a besoin de constituer ses réserves pour l'hiver.

Conclusion

La préparation à l'hivernage est une phase décisive dans la gestion des ruches. Une colonie bien préparée à l’automne a beaucoup plus de chances de survivre à l’hiver et de démarrer vigoureusement au printemps suivant. En tant qu’apiculteur, votre vigilance et vos actions proactives durant cette période sont essentielles pour assurer la pérennité de vos colonies. Bonne préparation et n’oubliez pas : chaque détail compte !

Les travaux de l'apiculteur lors de la phase d'essaimage : Les travaux sur le rucher et les travaux à l'atelier.